Observation de la réponse à la transfusion plaquettaire prophylactique.
« Observation de la réponse à la transfusion plaquettaire prophylactique chez les patients gravement malades : une étude prospective multicentrique »
Cette étude vise à décrire la réponse à la transfusion plaquettaire prophylactique, d'identifier les facteurs associés à une réponse transfusionnelle sous-optimale et une éventuelle association entre mauvaise réponse transfusionnelle et pronostic (mortalité et évènements hémorragiques) des patients. Collaboration entre les services de réanimation du Grand Ouest (Vannes, Morlaix, services de MIR des CHU de Tours, Nantes, Angers, Rennes et Brest, et services de réanimation chirurgicale des CHU de Rennes et de Brest), à l’initiative du service de médecine intensive réanimation du CHU de Brest, la Pr Cécile Aubron, PU-PH de médecine intensive réanimation (MIR), est la principale investigatrice de cette étude prospective multicentrique qui a été possible grâce au soutien du CHU de Brest.
Contexte
Jusqu’à 40% des patients hospitalisés en réanimation sont thrombopéniques (taux de plaquettes <150 000/mm3). La transfusion plaquettaire prophylactique est donnée pour prévenir les saignements chez les patients les plus thrombopéniques. La réponse à la transfusion plaquettaire prophylactique en terme d ‘augmentation de la numération plaquettaire après transfusion est variable selon les patients, ce qui pose la question de la signification d’une mauvaise réponse transfusionnelle et de l'optimisation des pratiques transfusionnelles.
Cette étude visait à décrire la réponse à la transfusion plaquettaire prophylactique, d'identifier les facteurs associés à une réponse transfusionnelle sous-optimale, d’identifier une éventuelle association entre mauvaise réponse transfusionnelle et pronostic (mortalité et évènements hémorragiques) des patients.
Méthodes
Il s’agit d’une étude observationnelle prospective multicentrique effectuée dans 9 réanimations de 7 hôpitaux du Grand Ouest. Les patients adultes ayant reçu au moins une transfusion plaquettaire prophylactique en réanimation pendant la période de l’étude allant jusqu'à 16 mois étaient inclus après obtention de leur non-opposition ou de celle de leur proche. La mauvaise réponse à la transfusion plaquettaire transfusionnelle était définie comme un incrément de numération corrigé (ICC), qui tient compte de la dose de plaquettes administrée et de la surface corporelle du patient, inférieur à 7 18 à 24 heures après l’administration de concentrés plaquettaires. Les facteurs associés à une mauvaise réponse à la transfusion plaquettaire ont été évalués dans un modèle à effets mixtes. Des analyses de sensibilité ont été réalisées chez des patients avec ou sans hémopathie.
Résultats
Un total de 349 des 472 (73,9 %) transfusions plaquettaires prophylactiques administrées à 141 des 181 (77,9 %) patients inclus avaient une mauvaise réponse transfusionnelle sur la base de l’ICC. Le taux d'hémoglobine à l'admission en réanimation (odds ratio (OR) : 0,79 [intervalle de confiance à 95 % (IC) 0,7-0,89]) et l'indice de masse corporelle (IMC) (OR : 0,93 [0,89-0,98]) étaient indépendamment associés avec une bonne réponse transfusionnelle, alors qu’une hémopathie, (OR 1.93 [1.09–3.43]), un sepsis à l’admission (OR: 2.81 [1.57–5.03]), la sévérité du patient au moment de la transfusion évaluée par le score SOFA (OR 1.10 [1.03; 1.17]) et la durée de conservation des plaquettes (OR: 1.24 [1.02–1.52]) étaient associées à une réponse sous optimale à la transfusion plaquettaire. Il n’y avait pas de différence de pronostic entre les patients ayant au moins une transfusion avec réponse transfusionnelle sous optimale et les autres.
Conclusions Ce travail est la première étude prospective multicentrique évaluant de façon précise la réponse transfusionnelle après administration prophylactique de plaquettes en réanimation. Près des trois quarts des transfusions plaquettaires prophylactiques entrainent une augmentation sous-optimale de la numération plaquettaires 18 à 24 heures après la transfusion sans effet sur le pronostic du patient. Parmi les paramètres identifiés comme associés à une moins bonne réponse transfusionnelle, la durée de conservation des concentrés plaquettaires était le seul facteur accessible à l'intervention.