Le prix de la santé numérique pour le projet SIAM.Rencontre avec le Dr Sofian Berrouiguet Le Dr Sofian Berrouiguet a obtenu le prix de la santé numérique de la Fondation de l’Avenir pour son travail innovant sur la prévention de la récidive après une tentative de suicide, le projet Siam. Son idée : utiliser le SMS pour garder le lien avec le patient dès sa sortie de l’hôpital. Un dispositif d’ores et déjà piloté par le CHRU de Brest. En France, on compte plus de 10 000 morts par suicide par an et près de 200 000 tentatives de suicide, la Bretagne étant la région la plus touchée. Dr Berrouiguet, en quoi consiste le projet Siam ?Siam signifie Suicide Intervention Assisted by Messages, un clin d’œil à la grand-rue de Brest. C’est un dispositif de veille par SMS pour la prévention de larécidive suicidaire. L’idée est simple : proposer au patient suicidant, en plus de son suivi, des SMS pour maintenir le contact. Le SMS est très démocratique, tout le monde y a accès. Ce contact direct entre personnel soignant et patient existe déjà avec un système de messages électroniques, mais le niveau de personnalisation est faible. On s’est donc dit que l’on pourrait élargir ce support à un ou plusieurs proches du patient pour des messages plus affectifs. Eux aussi souffrent de la tentative de suicide du patient : les intégrer au suivi des soins en tant qu’aidants permet également de les soutenir. Comment est né ce projet et où en sont les essais ?Le projet SIAM s’appuie sur plusieurs études menées depuis les années soixante-dix, qui montrent que le maintien d’un lien avec des personnes suicidantes, par carte postale, message, coup de fil… permet de réduire de façon significative les risques de récidive.L’étude de l’acceptabilité des SMS par les patients suicidants était mon sujet de thèse de médecine, je travaille dessus depuis 2011. Depuis 2014, le suivi avec SMS est testé au sein d’une dizaine de centres en France, avec l’objectif d’évaluer l’impact de cette méthode comparée à un suivi habituel.En 2017, nous proposons donc une extension de ce projet en intégrant les proches des patients suicidants. Cet essai, piloté par le CHRU de Brest et largement soutenu par la Fondation de l’Avenir, se déroulera à Brest dans un premier temps. Concrètement, comment va se dérouler l’essai SIAM au CHRU de Brest ?Cette étude va inclure 530 patients (deux groupes de 265). À leur sortie de l’hôpital, chaque sujet de l’étude SIAM – des adultes ayant survécu à un passage à l’acte suicidaire – désigne l’aidant de son choix, qui lui enverra des SMS à J2, J7, J15, puis sur une fréquence mensuelle. Parallèlement, les patients seront évalués lors de visites de contrôle à J0, puis à 6 et 13 mois. L’objectif est de vérifier l’efficacité de cette méthode en comparant le nombre de patients récidivant au sein du groupe témoin (suivi habituel) et du groupe recevant des SMS. Alors que la fréquence de récidive à 6 mois est de l’ordre de 18 %, nous espérons faire chuter cette moyenne à 9 % grâce à cette méthode. Quel avenir pour ces projets qui ont recours à la technologie ?Nous nous servons de la technologie uniquement en complément des soins existants. Les prochaines étapes comprennent l’intégration des technologies plus récentes : smartphones, objets connectés. La philosophie reste cependant la même : on témoigne au patient que l’on s’inquiète pour lui et on ne remplace pas le soignant par la technologie. Je suis très aidé dans ces projets par une nouvelle génération d’internes en psychiatrie et d’infirmiers du CHRU de Brest et par l’entreprise Sys.vision créée par Michel Gravey. Le Professeur Walter nous a soutenus dès le début pour ces projets sur lesquels on collabore désormais étroitement avec l’institut Mines Telecom de Brest, et plusieurs pays comme l’Espagne, l’Australie ou les États Unis. À propos du Dr Sofian Berrouiguet- Responsable de l’unité d’hospitalisation des urgences psychiatriques du CHRU de Brest- Médecin coordinateur de la Bretagne du dispositif prévention du suicide VigilanSEn parallèle au dispositif SIAM et depuis son séjour de mobilité du CHRU en Espagne, en 2014, Sofian Berrouiguet mène des recherches pour dépister les troubles du sommeil après un geste suicidaire grâce à une montre connectée (SSLeeM) et à une application smartphone : si la montre est acceptée par les patients, les tests démarreront cette année sur une centaine de sujets au CHRU de Brest.